2020, année pivot pour le marché automobile, s’ouvre sur une note négative et électrique

Après 6 années de hausse, le marché des automobiles neuves entame l’année 2020 sur une forte baisse de 13,5%. Et ce n’est pas une surprise !

À partir de cette année, les constructeurs devront en Europe, se conformer à de nouveaux niveaux d’émissions de CO2 au risque de payer de lourdes amendes. Ces niveaux d’émissions calculés pour chaque constructeur en fonction notamment des poids et des taux d’émissions des modèles vendus, sont ambitieux et ils seront difficiles à atteindre.

Aussi, pour échapper en partie à cette contrainte réglementaire européenne, la plupart des marques ont choisi d’accélérer en fin d’année dernière les livraisons des véhicules les plus émetteurs à l’aide d’immatriculations dites tactiques (véhicules de démonstrations, ventes aux loueurs…). Dans le même temps, elles ont en France, encouragé les ménages à anticiper leur achat afin d’esquiver le durcissement du malus écologique national. Un mois après les performances tonitruantes de décembre, le contrecoup est sévère en janvier 2020.

Dans le détail des canaux de demande on relève un effondrement de 24,5% des ventes aux particuliers dont la part est passée sous le seuil des 44% du total des ventes (43,8%). Heureusement, comme ce fut le cas toute l’année passée, les ventes aux sociétés ont beaucoup mieux résisté avec un recul limité à 2,3%. Le tableau aurait pu être encore plus sombre sans les immatriculations tactiques. En effet, si les ventes aux loueurs courtes durées ont dévisséde 22,4%, les immatriculations sur stocks de démonstrations ont encore gagné 6,5% ; elles ont représenté un cinquième du marché. Les ventes aux constructeurs ont elles aussi progressé de 7,5% à 3% du total de janvier.

La demande a donc encore clairement reculé côté des ménages. Sa chute est pourtant largement amortie par le leasing (essentiellement la LOA – Location avec Option d’Achat) qui n’a reculé que de 6,7% contre – 33,9% pour les achats directs. Le leasing a pesé pour 43% des ventes aux ménages de janvier 2020 contre 35% en janvier 2019 et 38% en moyenne 2019. Ce mode de financement séduit de plus en plus et contribue à lisser le marché grâce aux renouvellements programmés des contrats anciens.

La Location longue durée, autre mode de financement encore généralement adressé aux entreprises, limite également la casse avec un recul limité à 2,6%. Elle a couvert 28,3% des ventes hors ménage.

Bilan des immatriculations Janvier 2020 – Chiffres Autoways à partir du SIV

Il est évidemment encore difficile de dire combien de temps durera la correction. Sur le plan macro-économique, le ralentissement attendu a été plus prononcé que prévu au dernier trimestre 2019, mais les fondamentaux restent bons avec notamment un pouvoir d’achat à un niveau de croissance inédit depuis 2007 (+2,1%), une baisse du taux chômage très significative (-3,3 points sur l’année 2019) et des taux d’intérêt toujours au plus bas. La confiance et les propensions à investir dans des biens durables pourraient bien se rétablir d’autant plus vite que la situation se normalisera dans le domaine social.

À moins que les acheteurs ne se reportent massivement sur l’occasion comme ils l’ont fait durant ce mois écoulé. Les ventes de VO ont en effet augmenté en janvier de 11,8% sur un an. Et le profil de variation des VO par catégorie d’âges est édifiant. Les VO de moins d’un an, majoritairement les véhicules de démonstrations écoulés en masse en fin d’année dernière ont progressé de 12,6% tandis que les voitures âgées de 1 à 2 ans n’ont gagné que 2,6%. Les deux à cinq ans, en large partie les retours des premiers contrats de leasing des années 2014-2018, se sont envolées à +14,2%. Dans les catégories intermédiaires de 5 à 10 ans, les ventes ont timidement cru de 2,4%. Enfin, les véhicules anciens de dix à quinze ans (22,4% du marché VO) ont bondi de 12,8% et ceux de plus de quinze ans (21% du marché VO) de 21,4%. Ces derniers chiffres illustrent parfaitement la difficulté d’accéder au neuf pour certaines catégories de population.

Il semble donc acquis que le marché neuf reculera en 2020 au profit du marché de l’occasion. L’incertitude et l’attentisme sur le neuf pourrait aussi procéder de la volonté de faire le bon choix en termes d’énergie. Le véhicule électrique et ses versions hybridées constituent le principal levier des marques pour réduire leurs émissions. Les offres de modèles propulsés à l’électrique ou hybrides se multiplient mais les promesses d’économie à l’usage qui les accompagnent se heurtent encore à des craintes, justifiées ou non, en matière d’autonomie et de capacité de recharge. Surtout, les prix d’achat de ces véhicules électriques restent plus élevés que ceux des véhicules thermiques. Plutôt que de renouveler leur voiture, les automobilistes pourraient bien décider de les faire durer dans la perspective de réassurance et de baisse des prix.

Il ne faut donc pas crier trop vite victoire face aux résultats apparemment encourageants du mois de janvier en termes de structure énergie des ventes. Les ventes de véhicules 100% électriques se sont en effet envolées pour assurer 8,2% des ventes en janvier 2020 (contre 1,9% en moyenne 2019). Elles ont atteint presque 8% des ventes aux ménages, 4,5% des ventes aux sociétés et 14% des ventes aux constructeurs et de démonstrations ! Un signal positif et encourageant certes, mais difficile de ne pas y voir une manœuvre de décalage des livraisons du portefeuille de commandes 2019 à janvier 2020. Ce faisant, les marques pourront bénéficier d’un effet de comptage de CO2 d’autant plus bénéfique que pour le calcul des émissions moyennes, les VE compteront doubles en 2020…

Les ventes hybrides ont elles assuré 11,4% du marché (dont près de 2,8% pour l’hybride rechargeable) et permis à Toyota d’atteindre une pénétration record de 7,2%.

Les ventes diesel ( -19,7% sur un an à 31,7% de pénétration sur le marché, 22% chez les ménages) et plus encore essence (-27,3% et 48,7% de pénétration) ont logiquement fait les frais de de ce mois de janvier électrique.

 

Eric Champarnaud d’après les chiffres Autoways

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